Je viens de finir de lire un roman que je lis tranquillement depuis des mois: L’Hôtel New Hampshire. C’était vraiment bien. La fin m’a tout ému.
C’est l’histoire d’une famille de 5 enfants, les parents et le grand-père (et un chien et un ours) et de toutes les niaiseries que font ensemble les enfants d’une famille nombreuse.
Le père a un rêve et une vision plutôt romantique de posséder un hôtel et veut, malgré le manque d’argent et le peu de clients, offrir une expérience hôtelière exemplaire:
Un bon hôtel est une aire de solidarité. Un bon hôtel est toujours là quand il le faut. Il se charge de fournir l’espace et l’atmosphère, tout ce dont les gens peuvent avoir besoin. Dans un grand hôtel, si quelqu’un arrive en pièces détachés, en petits morceaux, eh bien, il repart refait à neuf. On vous remet sur pied, voilà, mais tout se passe de façon presque mystique.
La famille est donc entraînée dans ce rêve romantique dès le plus jeune âge des enfants. Sauf que des enfants qui habitent et grandissent dans un hôtel, ça suscite plein de situations cocasses: Ils courent et jouent dans les corridors et les escaliers. Ils s’amusent à espionner les clients dans les chambres avec le système d’interphone. Ils s’amusent avec les lumières. Le plus jeune utilise toutes les chambres comme salle de jeux et y laisse traîner ses jouets que les clients retrouvent et rapporte à la réceptions.
La première des illusions de mon père était que les ours peuvent survivrent à la vie que mène les humains, et la seconde que les humains peuvent survivre à la vie que l’on mène dans les hôtels.
J’aime beaucoup l’ambiance du livre et comment c’est écrit. L’histoire est raconté par le troisième enfants qui, à l’âge adulte, écrit ses mémoires. Alors quand il raconte une anecdote, elle est immédiatement commentée par les autres enfants, comme si elle avait été plusieurs fois racontée et que, à chaque fois, la sœur ou le frère aîné avait ajouté une remarque ou une moquerie. C’est difficile à expliquer mais c’est vraiment cool et très authentique. C’est comme si on était un visiteur de l’hôtel et que les hôteliers, des enfants de 5 à 17 ans, nous racontaient des histoires en parlant tous en même temps. Ça me rappelle les souper de famille, ma famille à moi, où on se met à se raconter des vieux souvenirs.
Notre histoire favorite concernait l’idylle entre mon père et ma mère: comment notre père avait fait l’acquisition de l’ours; comment notre père et notre mère s’étaient retrouvés amoureux et , coup sur coup, avaient engendré Frank, Franny et moi-même («Pan, Pan, Pan!» disait Franny) – puis, après un bref intermède, Lily et Egg («Paff et Pschitt!» disait Franny).
Et pour une famille aussi originale, celle dans le livre, ils ont beaucoup de vécus! Ils racontent comment leur parents, alors étudiants, se sont rencontrés dans un hôtel et comment le père a acheté un ours dressé pour donner des spectacles et payer ses études universitaires. Ils racontent comment le père a acheté une vieille école pour filles et comment toute la famille l’a rénovée pour la transformer en hôtel. Comment ils ont célébré le nouvel an avec les quelques clients, dont un médecin finlandais qui posa un diagnostique troublant sur leur sœur. Ils racontent comment leur chien Sorrow n’arrêtait pas de péter et a continué de les hanter longtemps après sa mort. Ils racontent comment ils ont tous déménagé à Vienne à l’adolescence pour gérer un second hôtel, celui-ci habité principalement par «des putins et des extrémistes révolutionnaires». Ils racontent comment les «putins» en question se sont occupés d’eux comme plusieurs mamans dans l’absence de leur mère. Et comment les extrémistes leur faisaient la lecture le soir de Moby Dick ou Gatsby le Magnifique.
Mais il n’y a pas que du drôle dans ce livre. Le récit couvre une très longue période et la vie à cette fâcheuse habitude d’entrelacer les beaux moments avec des événements tristes ou tragiques. Ainsi, on les accompagne dans leur tristesse, leur Sorrow (leur chien péteur). Et sans rentrer dans les détails pour ne rien gâcher, j’ai trouvé que c’était un livre très humain et même parfois «féministe» dans sa représentation des personnages féminins nuancés, des amours et du sexe adolescents, de l’univers des travailleuses du sexe et celui des victimes de viol. Ca peut sembler lourd dit comme ça, mais ces sujets sont amenés avec la même légèreté que tout le reste du récit, malgré le coté sérieux. Donc ça passe bien. Pour un livre écrit en 1981, c’est plutôt étonnant comment il traite bien les femmes!
Le livre a été une recommandation des bibliothécaires quand j’étais allé me chercher des romans en disant «je sais pas ce que je cherche mais j’aime les trucs un peu particulier I guess». Et là c’est à mon tour de le recommander! C’est vraiment bon!
L’Hôtel New Hampshire, de John Irving. Traduction française de The Hotel New Hampshire, 1981.
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